Page 32 - Les tabernacles du Québec des XVIIe et XVIIIe siècles
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6520. Cet intérêt particulier pour les tabernacles anciens ne datait pas d’hier, puisque ma première
publication en tant qu’historien d’art avait justement trait à l’ancien tabernacle des Récollets de
Trois-Rivières conservé dans la sacristie de l’église Saint-Maurice (Champlain). Je l’avais retracé en
1971 dans le cadre d’une campagne photographique de trois mois qui m’avait permis de découvrir
le patrimoine, de centaines d’églises réparties sur les deux tiers du territoire du Québec. Ce projet
estival m’avait fait prendre conscience tout à la fois de la richesse d’une facette méconnue de notre
patrimoine, mais aussi de sa grande vulnérabilité. Je me souviens encore du bonheur que j’ai éprouvé
devant le maître-autel richement ouvragé de l’église de Saint-Onésime, dont j’ai appris plus tard qu’il
provenait de la paroisse mère de Sainte-Anne-de-la-Pocatière; malgré des repeints abondants, j’ai
notamment pu apprécier de près la finesse d’exécution de sa monstrance. Or, ce bel ouvrage est parti
en fumée quelques mois plus tard, alors qu’un violent incendie a rasé l’église qui l’abritait.

Le lecteur ne saurait donc s’étonner de l’intérêt que j’ai porté au projet du tandem Drouin-Payer et
du plaisir que me donne la parution de leur solide ouvrage. D’autant qu’il faut savoir que Daniel et
Claude ont fait partie de la cohorte des étudiants que j’ai eu le privilège de former à l’Université Laval
à compter de 1978. Pour un, Claude Payer s’est révélé un assistant de recherche très efficace dès l’été
1979, réalisant, de concert avec Mario Béland, un imposant index iconographique à partir du fonds
Gérard-Morisset de l’Inventaire des œuvres d’art du Québec. Dans la foulée de son diplôme de premier
cycle en histoire de l’art, il a acquis une formation de pointe dans le domaine de la restauration de la
sculpture sur bois. Il a bientôt su faire profiter de sa double expertise le Centre de conservation du
Québec qui avait ouvert ses portes en 1979. Pour sa part, Daniel Drouin a été un de mes derniers
étudiants aux études avancées au début des années 1990. Chercheur méthodique et doué disposant déjà
d’une bonne formation dans le domaine des communications, il a plus tard fait ses classes pratiques
au MNBAQ comme « conservateur associé de l’art ancien avant 1850 » sous l’égide de mon ancien
collaborateur Yves Lacasse. Par-delà la spécificité de leur parcours respectif, Claude Payer et Daniel
Drouin étaient en quelque sorte destinés à travailler ensemble à la faveur d’une passion partagée –
mais peu commune ! – pour l’art ancien du Québec.

Pendant les quelque 35 dernières années, les conservateurs travaillant au MNBAQ ont développé une
interface très fructueuse avec l’équipe de restaurateurs du CCQ, générant des publications fondées
sur leurs compétences convergentes. En 2003, la parution d’une série de textes sur la sculpture
ancienne en hommage à l’historien d’art Gérard Lavallée a mis en lumière les vastes compétences de
Claude Payer, responsable de l’atelier de sculptures au CCQ. Au début des années 1990, le Centre de
conservation du Québec jonglait déjà avec l’idée d’amorcer une recherche de fond sur les tabernacles
des églises québécoises. D’un projet à l’autre, il avait accumulé un tel lot d’information inédite sur
de précieux meubles liturgiques qu’il a jugé opportun de prévoir une publication sur le sujet dans le
cadre des activités entourant le 35e anniversaire de sa fondation. Et c’est ainsi que, de fil en aiguille,
Claude Payer et Daniel Drouin en sont venus à définir conjointement le projet d’écriture d’un ouvrage
de synthèse sur les tabernacles, étude apte à tirer parti des résultats tangibles des travaux de Claude
portant sur différents spécimens de ce meuble. Ce projet ambitieux et quelque peu inorthodoxe a été
accueilli avec enthousiasme par le directeur du CCQ de l’époque, René Bouchard, celui-ci donnant le

5 20. PORTER, John R. avec la collaboration de Jean BÉLISLE, La sculpture ancienne au Québec, trois siècles d’art religieux et profane.
Montréal, Les Éditions de l’Homme, 1986, 513 pages.

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