Page 31 - Les tabernacles du Québec des XVIIe et XVIIIe siècles
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s ce contexte que s’inscrit la contribution de Daniel Drouin et Claude Payer, contribution
interdisciplinaire qui conjugue l’héritage historiographique et la méthode de l’historien de l’art
d’une part, avec l’analyse approfondie de témoins matériels et la maîtrise artistique associée au travail
professionnel du restaurateur d’autre part. Un tel scénario n’aurait évidemment pas été possible dans
les années 1920, 1940 ou 1960. Et bien malin celui qui aurait alors rêvé de la synergie de deux
institutions publiques engagées dans la conservation et la mise en valeur d’un patrimoine identitaire,
en l’occurrence le Musée national des beaux-arts du Québec (MNBAQ) et le Centre de conservation
du Québec (CCQ).
Au fil de ma carrière de conservateur, de professeur-chercheur, de gestionnaire muséal et d’adminis-
trateur de sociétés, j’ai insisté sans relâche sur la nécessité de mettre en contexte les actions que l’on
a accomplies par le passé ou que l’on mène au présent, y voyant un passage obligé pour comprendre
le comment et le pourquoi des choses518. De fait, autant la vision se révèle essentielle en amont d’un
projet, autant la mise en perspective apparaît éclairante en aval de ce qui a pu être accompli.
Mise en contexte
Pour ceux qui l’ignoreraient, ma spécialité première a été l’art ancien du Québec. Avant de m’intéresser
à Rubens, à Camille Claudel, à Louis-Philippe Hébert, à Jean Paul Lemieux, à Jean-Paul Riopelle,
à Alfred Pellan ou encore à l’art inuit, je me suis en effet passionné pour l’héritage de nos peintres,
sculpteurs, ornemanistes et meubliers des xviie, xviiie et xixe siècles, leur consacrant nombre de livres,
de catalogues, d’articles et d’années d’enseignement universitaire. C’est ainsi que j’ai exploré plusieurs
pistes de recherche, balisant des terrains vierges et traçant quelques avenues prometteuses, tantôt au
gré de découpes particulières, tantôt par des travaux de synthèse. Au fil de cette longue démarche,
j’ai naturellement manifesté un intérêt particulier à l’égard du décor de nos églises anciennes et de ce
qui en a toujours constitué le point central, à savoir ce meuble liturgique qu’on appelle le tabernacle.
Dans son mémoire de maîtrise déposé à l’Université Laval en août 1989, Jean-Pierre Labiau en a
souligné l’importance en ces termes : « Le tabernacle a longtemps constitué la seule décoration qui se
trouvait à l’intérieur des églises. Situé dans le chœur, endroit stratégique, son importance s’accentuait
du fait qu’il était le point de convergence de tous les regards et prenait ainsi une valeur symbolique
indiscutable519. »
Réalisé sous ma direction, le mémoire de Jean-Pierre Labiau n’a pas été le seul témoignage de mon
intérêt personnel pour les tabernacles anciens du Québec. Pendant une vingtaine d’années, il m’a été
donné de mener diverses recherches assorties de découvertes de toutes sortes, aussi bien de meubles
liturgiques anciens que de documents s’y rapportant. Tout en m’intéressant à la carrière de sculpteurs
et ornemanistes, j’ai abordé des questions aussi variées que le décor ouvré, l’iconographie, la dorure, la
provenance, la mobilité, la mise au goût du jour, l’altération ou la reconstitution de tabernacles. Tout
cela a naturellement trouvé écho dans mon ouvrage de synthèse paru aux Éditions de l’Homme en
518. Voir John R. PORTER, avec le concours de Natalie RINFRET, Devenir un leader culturel. Récit d’un rêveur pragmatique. Québec,
Presses de l’Université du Québec, 2013, 360 pages.
519. LABIAU, Jean-Pierre, op. cit., p. 3.
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interdisciplinaire qui conjugue l’héritage historiographique et la méthode de l’historien de l’art
d’une part, avec l’analyse approfondie de témoins matériels et la maîtrise artistique associée au travail
professionnel du restaurateur d’autre part. Un tel scénario n’aurait évidemment pas été possible dans
les années 1920, 1940 ou 1960. Et bien malin celui qui aurait alors rêvé de la synergie de deux
institutions publiques engagées dans la conservation et la mise en valeur d’un patrimoine identitaire,
en l’occurrence le Musée national des beaux-arts du Québec (MNBAQ) et le Centre de conservation
du Québec (CCQ).
Au fil de ma carrière de conservateur, de professeur-chercheur, de gestionnaire muséal et d’adminis-
trateur de sociétés, j’ai insisté sans relâche sur la nécessité de mettre en contexte les actions que l’on
a accomplies par le passé ou que l’on mène au présent, y voyant un passage obligé pour comprendre
le comment et le pourquoi des choses518. De fait, autant la vision se révèle essentielle en amont d’un
projet, autant la mise en perspective apparaît éclairante en aval de ce qui a pu être accompli.
Mise en contexte
Pour ceux qui l’ignoreraient, ma spécialité première a été l’art ancien du Québec. Avant de m’intéresser
à Rubens, à Camille Claudel, à Louis-Philippe Hébert, à Jean Paul Lemieux, à Jean-Paul Riopelle,
à Alfred Pellan ou encore à l’art inuit, je me suis en effet passionné pour l’héritage de nos peintres,
sculpteurs, ornemanistes et meubliers des xviie, xviiie et xixe siècles, leur consacrant nombre de livres,
de catalogues, d’articles et d’années d’enseignement universitaire. C’est ainsi que j’ai exploré plusieurs
pistes de recherche, balisant des terrains vierges et traçant quelques avenues prometteuses, tantôt au
gré de découpes particulières, tantôt par des travaux de synthèse. Au fil de cette longue démarche,
j’ai naturellement manifesté un intérêt particulier à l’égard du décor de nos églises anciennes et de ce
qui en a toujours constitué le point central, à savoir ce meuble liturgique qu’on appelle le tabernacle.
Dans son mémoire de maîtrise déposé à l’Université Laval en août 1989, Jean-Pierre Labiau en a
souligné l’importance en ces termes : « Le tabernacle a longtemps constitué la seule décoration qui se
trouvait à l’intérieur des églises. Situé dans le chœur, endroit stratégique, son importance s’accentuait
du fait qu’il était le point de convergence de tous les regards et prenait ainsi une valeur symbolique
indiscutable519. »
Réalisé sous ma direction, le mémoire de Jean-Pierre Labiau n’a pas été le seul témoignage de mon
intérêt personnel pour les tabernacles anciens du Québec. Pendant une vingtaine d’années, il m’a été
donné de mener diverses recherches assorties de découvertes de toutes sortes, aussi bien de meubles
liturgiques anciens que de documents s’y rapportant. Tout en m’intéressant à la carrière de sculpteurs
et ornemanistes, j’ai abordé des questions aussi variées que le décor ouvré, l’iconographie, la dorure, la
provenance, la mobilité, la mise au goût du jour, l’altération ou la reconstitution de tabernacles. Tout
cela a naturellement trouvé écho dans mon ouvrage de synthèse paru aux Éditions de l’Homme en
518. Voir John R. PORTER, avec le concours de Natalie RINFRET, Devenir un leader culturel. Récit d’un rêveur pragmatique. Québec,
Presses de l’Université du Québec, 2013, 360 pages.
519. LABIAU, Jean-Pierre, op. cit., p. 3.
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