Page 13 - Architectures d'exposition
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eractifs, aux activités d’animation et aux d’aluminium perforé. Ils ont ensuite érigé dans réduit considérablement le réchauffement
a teliers éducatifs répartis sur les planchers les salles un plancher surélevé amovible, sous solaire et les besoins en climatisation.
d’exposition. Mais comment faire d’un tel bâti- lequel passent le réseau informatique et les
ment autre chose qu’un simple entrepôt ? conduites d’eau, de ventilation et d’électricité. Outre ce défi technique, les hangars du quai
Enfin, pour inciter le visiteur à flâner à sa guise, King-Edward présentaient un problème
Sélectionnés après une entrevue, les archi- ils ont multiplié les escaliers de jonction et d’échelle. Parce qu’ils remplissent presque
tectes Faucher Aubertin Brodeur Gauthier – en percé à travers les planchers existants une complètement le quai, on a, en visitant le Vieux-
association avec Gauthier Daoust Lestage – série d’ouvertures permettant de voir d’un Port, très peu de recul pour les apprécier et en
ont suivi ici un raisonnement dans la continuité étage à l’autre. saisir l’ampleur véritable. À l’extérieur, plusieurs
de leur projet pour la Biosphère. Alors qu’on dispositifs ont donc été imaginés pour imposer
prévoyait démolir les hangars bâtis entre 1905 Pour les concepteurs, la force du lieu tenait un rythme à l’ensemble : la rangée de lumi-
et 1908, ils ont fait valoir que ceux-ci étaient un à ses dimensions monumentales. Ils ont donc naires « phares » qui éclairent l’allée centrale ;
témoin essentiel de l’activité passée du port. eu le souci de laisser parler le bâtiment exis- les percements verticaux à travers les dalles du
Par leur échelle héroïque et leur structure tant : l’ossature d’acier reste partout visible volume des stationnements ; et, intégrée aux
innovatrice, en acier et en béton, ces hangars à l’intérieur et, dans les aires publiques, seule façades, la succession régulière des escaliers
constituaient aussi des artefacts techniques une chape de béton poli recouvre les dalles d’issue. De plus, pour que les surfaces lisses
remarquables. Pourquoi les jeter à terre, alors d’origine. Il n’y a eu en fait qu’une intervention du vitrage extérieur produisent un effet de
qu’on pouvait les réutiliser ? vraiment majeure, soit celle d’enlever le revê- « vibration » visuelle, le verre est imprimé d’un
tement en tôle des hangars, pour le remplacer motif fin et répétitif : c’est, en hommage à
À partir de ce moment, le mandat des archi- par une enveloppe performante, lumineuse et l’histoire du port, le message « SOS » épelé
tectes a été d’adapter les lieux existants à la plus durable. En raison de l’énorme surface en code morse.
mission du Centre. L’idée d’un parcours libre à vitrer, on a eu recours ici à une technologie
et d’un espace flexible s’est traduite par trois qui en était encore à ses débuts au Québec : Le résultat final est une architecture certes
dispositifs simples et ingénieux. Tout d’abord, la face externe des murs est séparée de la face austère, mais qui trouve bien sa place dans le
les architectes ont séparé les salles d’expo interne par un interstice de 15 centimètres, paysage du Vieux-Port. Selon le concepteur
sition des aires publiques par un système de ventilé à l’extérieur de façon naturelle, ce qui principal, Éric Gauthier, la frugalité de ce projet
cloisons légères, en verre et en panneaux traduit tout simplement la réalité du Canada :
malgré un désir affirmé d’architectures spec-
MB taculaires, on y investit en fait très peu dans
MB la création de lieux culturels. Depuis deux ans,
le manque de soutien gouvernemental rattrape
aussi l’institution elle-même : en dépit d’une
muséographie souvent primée et d’une fré-
quentation importante, en hausse continue
depuis l’ouverture, la gestion du Centre des
sciences a été confiée à la Société immobilière
du Canada, un organisme qui n’a pourtant
aucune vocation culturelle ou éducative. Une
visite récente laisse déjà craindre un certain
essoufflement de la programmation : des
s ections entières du bâtiment sont vides.
Il subsiste néanmoins dans ce musée des
moments de pur bonheur. Cet endroit est l’un
des seuls de Montréal où l’on peut encore
s’imaginer arrivant en bateau, comme il y a 50
ou 100 ans. Du bout du quai, on jouit d’une
superbe perspective sur les anciennes tours
de convoyeurs du quai Alexandra, les porte-
conteneurs du quai Bickerdike et, à l’entrée
du canal de Lachine, le silo à grains no 5 ; du
deuxième étage, c’est toute la façade de la
rue de la Commune qui se dévoile. Et puis,
à l’intérieur, on peut toujours admirer la ma-
gnifique structure de ces anciens hangars,
baignant dans une lumière à la fois généreuse
et tamisée.
Architectures d’exposition au Québec Centre des sciences de Montréal | 115
a teliers éducatifs répartis sur les planchers les salles un plancher surélevé amovible, sous solaire et les besoins en climatisation.
d’exposition. Mais comment faire d’un tel bâti- lequel passent le réseau informatique et les
ment autre chose qu’un simple entrepôt ? conduites d’eau, de ventilation et d’électricité. Outre ce défi technique, les hangars du quai
Enfin, pour inciter le visiteur à flâner à sa guise, King-Edward présentaient un problème
Sélectionnés après une entrevue, les archi- ils ont multiplié les escaliers de jonction et d’échelle. Parce qu’ils remplissent presque
tectes Faucher Aubertin Brodeur Gauthier – en percé à travers les planchers existants une complètement le quai, on a, en visitant le Vieux-
association avec Gauthier Daoust Lestage – série d’ouvertures permettant de voir d’un Port, très peu de recul pour les apprécier et en
ont suivi ici un raisonnement dans la continuité étage à l’autre. saisir l’ampleur véritable. À l’extérieur, plusieurs
de leur projet pour la Biosphère. Alors qu’on dispositifs ont donc été imaginés pour imposer
prévoyait démolir les hangars bâtis entre 1905 Pour les concepteurs, la force du lieu tenait un rythme à l’ensemble : la rangée de lumi-
et 1908, ils ont fait valoir que ceux-ci étaient un à ses dimensions monumentales. Ils ont donc naires « phares » qui éclairent l’allée centrale ;
témoin essentiel de l’activité passée du port. eu le souci de laisser parler le bâtiment exis- les percements verticaux à travers les dalles du
Par leur échelle héroïque et leur structure tant : l’ossature d’acier reste partout visible volume des stationnements ; et, intégrée aux
innovatrice, en acier et en béton, ces hangars à l’intérieur et, dans les aires publiques, seule façades, la succession régulière des escaliers
constituaient aussi des artefacts techniques une chape de béton poli recouvre les dalles d’issue. De plus, pour que les surfaces lisses
remarquables. Pourquoi les jeter à terre, alors d’origine. Il n’y a eu en fait qu’une intervention du vitrage extérieur produisent un effet de
qu’on pouvait les réutiliser ? vraiment majeure, soit celle d’enlever le revê- « vibration » visuelle, le verre est imprimé d’un
tement en tôle des hangars, pour le remplacer motif fin et répétitif : c’est, en hommage à
À partir de ce moment, le mandat des archi- par une enveloppe performante, lumineuse et l’histoire du port, le message « SOS » épelé
tectes a été d’adapter les lieux existants à la plus durable. En raison de l’énorme surface en code morse.
mission du Centre. L’idée d’un parcours libre à vitrer, on a eu recours ici à une technologie
et d’un espace flexible s’est traduite par trois qui en était encore à ses débuts au Québec : Le résultat final est une architecture certes
dispositifs simples et ingénieux. Tout d’abord, la face externe des murs est séparée de la face austère, mais qui trouve bien sa place dans le
les architectes ont séparé les salles d’expo interne par un interstice de 15 centimètres, paysage du Vieux-Port. Selon le concepteur
sition des aires publiques par un système de ventilé à l’extérieur de façon naturelle, ce qui principal, Éric Gauthier, la frugalité de ce projet
cloisons légères, en verre et en panneaux traduit tout simplement la réalité du Canada :
malgré un désir affirmé d’architectures spec-
MB taculaires, on y investit en fait très peu dans
MB la création de lieux culturels. Depuis deux ans,
le manque de soutien gouvernemental rattrape
aussi l’institution elle-même : en dépit d’une
muséographie souvent primée et d’une fré-
quentation importante, en hausse continue
depuis l’ouverture, la gestion du Centre des
sciences a été confiée à la Société immobilière
du Canada, un organisme qui n’a pourtant
aucune vocation culturelle ou éducative. Une
visite récente laisse déjà craindre un certain
essoufflement de la programmation : des
s ections entières du bâtiment sont vides.
Il subsiste néanmoins dans ce musée des
moments de pur bonheur. Cet endroit est l’un
des seuls de Montréal où l’on peut encore
s’imaginer arrivant en bateau, comme il y a 50
ou 100 ans. Du bout du quai, on jouit d’une
superbe perspective sur les anciennes tours
de convoyeurs du quai Alexandra, les porte-
conteneurs du quai Bickerdike et, à l’entrée
du canal de Lachine, le silo à grains no 5 ; du
deuxième étage, c’est toute la façade de la
rue de la Commune qui se dévoile. Et puis,
à l’intérieur, on peut toujours admirer la ma-
gnifique structure de ces anciens hangars,
baignant dans une lumière à la fois généreuse
et tamisée.
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